Just come home

Le retour à la tanière était une bénédiction, une douce caresse de la destinée sur des épaules encore engourdies par les affres de l'aventure. Ezra et les autres avaient eu beaucoup de chance de s’en sortir indemnes. Son escapade, impulsée par le désir de retrouver des affaires personnelles, avait été une décision irréfléchie, un caprice de l'instant qui avait mis en péril la quiétude de tous. Il n’avait pas laissé de mot à Enora, emporté par son propre élan, il s'était éclipsé à l’aube, aveuglé par la certitude de son retour le soir même. Mais le temps s'était étiré, des jours s'étaient écoulés avant qu'il ne réapparaisse, chargé de remords et de regrets.

Chaque minute passée loin d'elle était une épine dans son cœur, une pensée lancinante qui le tourmentait. Il ne pouvait s’empêcher de se mettre à la place de la brune, imaginant les tourments qu'elle avait dû endurer en son absence. Il se reprochait chaque seconde écoulée loin de sa présence rassurante, craignant d'avoir mis en danger celle qu'il chérissait tant. Imaginer Enora se lançant à sa recherche dans les méandres de l'hiver implacable le glaçait d'effroi.

Il rendait grâce à la météo, dans un soupir de soulagement mêlé de reconnaissance, pour avoir infléchi le cours des événements. Le blizzard qui avait sévi, tel un gardien vigilant, avait retardé toute tentative de départ. Il savait que partir dans une tempête de neige aurait été un suicide, un acte de pure imprudence, chose qu’Enora ne ferait pas, contrairement à lui.

Tout ce qui touchait à elle était une flamme attisant les braises de sa passion, menaçant à tout instant de l'embraser complètement. Il était éperdument amoureux de cette femme, prêt à défier les éléments déchaînés, à braver les périls les plus sombres pour la retrouver, pour s'assurer qu’elle était saine et sauve, même s'il devait en payer le prix de sa propre vie. Il aurait traversé des océans en furie, affronté des tempêtes dévastatrices, pour sentir à nouveau sa présence à ses côtés, pour voir briller l'éclat de son sourire.

Les ténèbres de la jalousie et de la peur avaient obscurci son esprit lorsque, dans un tourbillon d'émotions, elle lui avait révélé être à l'hôpital, victime des coups infligés par son ex-compagnon. Dans cette rage impuissante, il avait senti bouillonner en lui un désir féroce de vengeance, prêt à écraser quiconque osait menacer son bonheur. Le souvenir de cette pulsion meurtrière le glaçait d'effroi, une sombre tentation qu'il savait avoir maîtrisée de justesse. Heureusement, dans un tournant du destin, l'épidémie avait frappé, détournant l'attention des autorités et offrant un répit à ses instincts primaires. Sans cet intermède providentiel, il aurait très certainement basculé dans l'abîme, condamné à errer dans les ténèbres de la prison, loin de celle qu'il aimait plus que tout au monde.

Dans les méandres de la nuit avancée, Ezra se dirigea péniblement vers sa chambre, ses pas traînant comme des chaînes de fatigue pesant sur ses épaules. Les jours écoulés à l’extérieur, baignés dans le tourbillon du danger et de l'incertitude, avaient laissé leur empreinte sur son corps et son esprit épuisés. Chaque pas était un effort, chaque souffle une lutte contre le poids des souvenirs et des épreuves traversées.

Pourtant, ce n'était pas seulement la fatigue qui alourdissait ses pas, c'était aussi le poids des anticipations tendues qui l'attendait derrière la porte de sa chambre. Il savait que les retrouvailles avec Enora seraient chargées d'une tension palpable, un nuage sombre suspendu au-dessus de leurs têtes. Il connaissait son caractère, sa fougue, sa sensibilité à fleur de peau, et il ne pouvait pas la blâmer pour la réaction qu’elle aurait lorsqu'il franchirait le seuil de la pièce.

Chaque fibre de son être frémissait à l'idée de la confrontation imminente, de ces mots qui allaient voler tels des flèches empoisonnées, de ces regards chargés de reproches et de douleur. Mais malgré la tension qui électrisait l'air, malgré les nuages sombres qui obscurcissaient leur horizon, il savait qu'il devait affronter cette tempête. Et c'est avec cette pensée comme une bouée d'espoir dans l'océan tumultueux de leurs émotions qu'il franchit enfin le seuil de la chambre, prêt à affronter les tourments de la nuit.

Mais Enora ne devait certainement pas s'attendre à ce qu'il arrive ainsi, et Ezra se retrouva face à elle, vêtu seulement de ses sous-vêtements. Un instant, il se figea, conscient de la situation incongrue dans laquelle il se trouvait.

Instinctivement, ses yeux avaient d'abord balayé les courbes de son corps, absorbant chaque détail dans un mélange de désir et de malaise. Mais réalisant soudainement la gêne de la situation, il ferma les paupières, cherchant à mettre un terme à cette intrusion visuelle involontaire.

“Je suis rentré, je suis déso…”

Quand je suis arrivée à Malden, après la catastrophe, j’espérais retrouver Ezra. Mais je n’ai retrouvé que des fantômes. Un fantôme de cette vie qui m’avait apporté tant de joie et de tristesse, mais je ne m’étais jamais sentie aussi vivante. Je n’ai que peu d’effets personnels avec moi, et parmi eux, j’ai le collier que m’a offert mon mari l’année de son décès, des photos, et un bracelet, qui appartenait à Ezra, récupéré par terre dans ce bar, la dernière fois que je l’avais vu. Quand j’ai décidé de rejoindre la Tanière, après qu’ils m’aient accueilli et surtout soigne ma cheville, je me suis mise à faire ce que je faisais le mieux. Réparer. Ça a comblé un temps, le vide qu’il y avait en moi.

Ezra est arrivé plusieurs mois après ma propre arrivée. Et de l’avoir vu là, face à moi, je ne saurais dire exactement ce que j’ai ressenti. La vie ne me l’avait pas enlevé lui aussi et malgré ma nature peu démonstrative, je crois que je ne l’ai pas quitté d’une semelle au moins pendant 3 jours entiers. Comme si nous avions le droit à cette deuxième chance, et on s’y accroche. Je sais que tout comme moi, il aurait aimé que Leroy soit là à nos côtés, mais quelque part c’est aussi une bonne chose qu’il ne le soit pas.

Parce qu’il n’assistera pas au massacre que je ferais si Ezra revient en vie après le blizzard que l’on a essuyé. Lorsqu’on m’a dit l’avoir vu partir à l’extérieur, je l’ai insulté vraiment de tous les noms dans mon esprit. Et je me suis jurée de lui faire regretter sa sortie à cet abruti.

Je guette la sortie tous les jours. Je me suis remise rapidement au travail parce que je n’avais aucune envie de traîner à l’infirmerie, ni même dans cette chambre vide que l’on partage lui et moi. Il y a son odeur partout et aussi la mienne, semblable à du désespoir plus les jours passent. Je le déteste d’avoir pris cette décision stupide. Pourquoi il ne réfléchit pas plus sérieusement ? Son instinct de survie semble proche de 0 dans cette décision. Je soupire en regardant la porte ce jour là. Je ne parviens pas à travailler. J’ai le corps douloureux, mais aussi l’esprit et le cœur. Je dors de plus en plus mal, et je suis de plus en plus inquiète. Mais ce que je déteste le plus, c’est cet espoir qui me quitte peu à peu, et ce soir, il n’est plus là. Je ramasse mes affaires, et je me détourne de la porte en me levant. Je préfère aller dans la chambre.

Je fais un détour par la douche, ou je peux contempler mon corps. J’ai des hématomes un peu partout, et cette coupure au front. Ma lèvre ne me fait plus vraiment mal même si elle est encore un peu gonflée. Se retrouver dans un bâtiment qui s’écroule ça n’a rien de drôle, mais je m’en sors plutôt bien. Je regagne la chambre, en soupirant. Je quitte ma serviette et j’enfile des sous vêtements propres. Une brassière de sport et une culotte en dentelle. Pas trop de choix en réalité. J’entends alors la porte derrière moi, alors que j’accroche les agrafes sur l’avant. Quelques secondes de moins et cela aurait une vue plongeante sur ma poitrine. Mais c’est Ezra. Je le regarde l’espace de quelques secondes avant qu’il ne prenne la parole. Et mon seul réflexe à cet instant et de lui foutre une claque, à m’en faire mal au doigt.  « Espèce d’abruti sans cervelle ! » J’attrape mes doigts de ma seconde main en jurant. Je secoue les doigts avant de souffler dessus comme si ça allait suffire.

Néanmoins, la pression redescend, et à cet instant, je m’en fiche un peu d’être à moitié à poil, je vais me loger dans ses bras, en passant mes bras autour de sa nuque. Le contact de son corps contre le mien me déclenche des frissons face à la froideur de tous les tissus qu’il porte. Je murmure d’une voix fatiguée mais en même temps soulagée.  « Si tu refais ça, j’te jure que je t’arrache ta prothèse pour te frapper avec. » Et je le regarde droit dans les yeux pour montrer que je suis sérieuse. Je m’écarte, parce qu’il faut qu’il se réchauffe à présent. Je l’aide à se débarrasser de son sac, et de ses vêtements. J’attrape au passage un tee shirt que j’enfile rapidement. Je prends la grosse couverture de mon lit, et une fois qu’il est en boxer, je la dépose sur ses épaules. Je le pousse à s’allonger sous la sienne, avec et je me glisse à ses côtés, contre lui.  « Ce serait con que tu perdes ton autre main ou un pied parce que t’es gelé. »

Ezra se préparait mentalement à être accueilli par un déluge de reproches de la part d'Enora. Il savait que son imprudence ne passerait pas inaperçue, que chaque mot qui s'échapperait de ses lèvres serait une lame acérée de colère. Elle était enragée, et il ne pouvait pas la blâmer. Après tout, il avait été stupide, cela ne faisait aucun doute.

Dans l'attente de la tempête verbale imminente, Ezra serra la mâchoire, se préparant mentalement à encaisser chaque coup. Il savait qu'il méritait chaque remontrance, chaque insulte qui allait jaillir de la bouche de celle qu'il aimait tant. Et pourtant, malgré le poids des reproches qui pesaient sur ses épaules, il était prêt à endurer ce qu'il fallait pour apaiser ne serait-ce qu'un peu la douleur qu'il avait infligée par son inconscience.

Ezra se préparait au torrent de paroles acerbes, mais ce à quoi il ne s'attendait pas, c'était de ressentir soudainement le brûlant impact d'une énorme gifle sur sa joue. Le choc le figea sur place, son visage éclatant de douleur et de surprise. Le son cinglant du contact résonna dans la pièce, brisant le silence pesant qui avait enveloppé leur rencontre.

Son regard, empli d'incrédulité, se posa sur Enora, dont la main était encore suspendue dans l'air, témoin muet de son geste impétueux.Ezra, loin d'être empli de colère, ressentait plutôt une profonde compréhension face à la réaction de son amie. Alors que la gifle cinglait sa joue, au lieu de ressentir de la rage, il accueillait ce geste avec une compassion silencieuse. Il comprenait la douleur qui avait conduit Enora à ce moment de rupture, la frustration et la peur qui avaient éclaté en un geste de désespoir.

Après la claque, Enora s’était précipité vers lui, enroulant ses bras autour de son cou dans un élan de tendresse inattendu. Ezra, surpris par ce geste soudain, sentit un mélange complexe d'émotions le submerger. La brûlure de la gifle sur sa joue n'était plus qu'un souvenir lointain alors qu'il se retrouvait enveloppé par la chaleur de son étreinte.

Pourtant, malgré le réconfort de ce contact, Ezra se sentit un peu gêné. Enora était encore en sous-vêtements, et bien que leur intimité soit déjà mise à nue par cet échange émotionnel, il ne pouvait s'empêcher de ressentir une pointe de malaise. Il se figea un instant, incertain de la meilleure façon de réagir.

Finalement, il choisit de répondre à son étreinte, laissant ses bras entourer doucement sa taille. Il pouvait sentir le battement de son cœur contre sa poitrine, une pulsation régulière qui semblait apaiser la tempête qui grondait en lui.

Ezra ne put réprimer un rire face à la remarque d'Enora. Ce rire était libérateur, un dérivatif bienvenu après la tension palpable qui avait régné dans la pièce. Il savait qu'elle plaisantait, que ses mots étaient un moyen de dissiper l'atmosphère pesante qui les entourait. Et pourtant, derrière le sourire qu'il arborait, il sentait une profonde gratitude envers Enora, pour sa capacité à alléger le fardeau de leurs épreuves avec une simple touche d'humour.

“ça serait mérité…” ajouta t’il, en la laissant retirer son sac de son dos et sa veste.

Ezra recula et continua à retirer ses vêtements un à un seul. Alors qu'il ôtait son haut, ses yeux se posèrent une dernière fois sur le corps à moitié nu d'Enora, une silhouette délicate et familière qui lui était si chère. Un instant de tendresse et de désir passa dans son regard avant qu'il ne détourne les yeux, respectant l'intimité de celle qu'il aimait.

S'asseyant sur le bord du lit, il se pencha pour retirer ses chaussures, sentant le poids de la journée s'estomper lentement avec chaque geste. Puis, se débarrassant de son pantalon, il se retrouva enfin vêtu seulement de son boxer, une sensation de liberté mêlée à une légère gêne face à sa propre nudité.

L'accident de moto avait laissé à Ezra bien plus qu'une simple amputation de l'avant-bras. Des cicatrices, comme des témoins muets, parsemaient son corps, chacune racontant une histoire douloureuse de cette journée fatidique.

Il y avait celle qui serpentait le long de son flanc, souvenir d'une glissade brutale sur le bitume rugueux. Une autre, plus profonde, zébrait son épaule, résultat de l'impact violent contre le sol. Chaque cicatrice était un rappel tangible de la violence de l'accident, des instants de terreur où sa vie avait pendu à un fil et là où il avait perdu son meilleur ami.

La couverture douce et réconfortante qu'Enora posa sur ses épaules agit comme un baume sur les pensées sombres qui tourbillonnaient dans l'esprit d'Ezra. Sentant le poids de ses soucis s'alléger peu à peu, il se laissa guider par son geste et s'allongea sous les couvertures, créant un espace accueillant pour qu'elle puisse le rejoindre.

Lorsqu'elle se glissa à ses côtés, faisant face à lui, Ezra ressentit une tension électrique qui parcourait son corps. La proximité avec Enora, bien qu'il l'ait désirée de tout son cœur, était difficile à gérer dans cet instant chargé d'émotions. Son amour pour elle était profond, indéniable, mais son esprit était encore hanté par l'image de ses courbes qu'il avait aperçues plus tôt, désormais si proches de lui sous les draps.

Il sentait son cœur battre la chamade dans sa poitrine alors qu'il luttait pour chasser les pensées indésirables qui envahissaient son esprit.

“On va éviter, même si parfois ça à ses avantages en combat ou contre les morsures mais pour ramasser une pièce tombée ou une carte sur le sol, c’est un enfer…”

Le regard d'Ezra se plongea dans celui d'Enora, créant un lien silencieux chargé d'émotions. Malgré la proximité physique, il percevait une certaine distance entre eux, une barrière invisible qui les séparait. Et dans cet instant, il réalisa que cette distance était une bénédiction déguisée, car il savait que s'ils se rapprochaient davantage, il perdrait tout contrôle sur son propre corps.

Épuisé par les événements récents, Ezra se sentait vulnérable, ses défenses affaiblies par la fatigue et les émotions tumultueuses. Il savait que s'il laissait Enora se coller à lui, le bas de son corps réagirait de manière incontrôlable, révélant ses désirs les plus intimes et les plus inavoués.

Il détourna légèrement le regard, cherchant à dissimuler la lutte intérieure qui faisait rage en lui. Il ne voulait pas qu'elle le voie dans cet état de faiblesse, cette incapacité à maîtriser ses propres désirs. Et pourtant, malgré sa volonté de se protéger, il se sentait attiré par elle, par la chaleur de son corps, par la promesse de réconfort et de sécurité qu'elle représentait.

Dans cet instant de tension silencieuse, il lutta pour garder le contrôle, pour enfouir ces désirs inavoués au plus profond de lui-même. Il savait que s'il cédait à la tentation, il risquait de perdre bien plus que son sang-froid.

"Merci d'être là", murmura-t-il doucement, ses mots empreints de sincérité et de reconnaissance. Encore une fois, elle prenait soin de lui, l'entourant de sa présence réconfortante.

Ezra replaça délicatement une mèche rebelle des cheveux d'Enora, savourant l'intimité de ce geste simple. Mais alors qu'il laissait sa main glisser le long de sa joue, une bouffée de désir l'envahit, faisant naître en lui un tumulte d'émotions contradictoires.

Sa peau était douce sous ses doigts, son souffle chaud caressant sa paume, et il lutta contre l'envie irrépressible de rompre la distance qui les séparait et de l'embrasser avec passion. Il sentit son cœur battre la chamade dans sa poitrine, le désir ardent luttant contre la raison, mais il se retint, résistant à la tentation qui le tiraillait.

Car il savait que ce n'était pas le moment, que leurs émotions étaient encore trop fragiles, trop instables. Il ne voulait pas risquer de précipiter les choses, de briser l'équilibre fragile qu'ils avaient réussi à trouver. Et ainsi, il laissa sa main glisser lentement le long de sa mâchoire, s'efforçant de refouler les pulsions qui le tourmentaient.

“Je suis désolé de t’avoir inquiété, j’ai été stupide, mais je voulais récupérer des affaires, des souvenirs…” murmura t’il

Alors qu'Ezra caressait doucement la joue d'Enora, une envie irrépressible montait en lui, une pulsion ardente qu'il peinait à contenir. Son regard se perdait dans les traits délicats de son visage, dans les blessures qui témoignaient de sa force et de sa résilience. Et dans cet instant de proximité intime, il sentit son cœur battre la chamade, le désir brûlant de lui offrir un baiser tendre et passionné.

Son pouce continuait de dessiner des cercles légers sur sa lèvre inférieure, une caresse douce et réconfortante. Mais sous la surface de cette tendresse, un feu ardent bouillonnait en lui, un désir ardent de fusionner leurs lèvres.

Il lutta contre cette impulsion, se rappelant les barrières qui les séparaient, les épreuves qu'ils avaient traversées. Mais malgré ses efforts pour réprimer ses désirs, il sentait que chaque fibre de son être criait le besoin de se rapprocher d'elle, de goûter à la douceur de ses lèvres, de se perdre dans son étreinte.

*puis merde*

Sous l'influence du désir et de l'émotion, Ezra se laissa emporter par ses instincts. Sans hésitation, sa main se glissa derrière la nuque d'Enora, l'attirant doucement vers lui dans un geste rempli d'audace et de tendresse. Avec détermination, il rapprocha ses lèvres des siennes et scella leur échange dans un baiser qui exprimait un besoin ardent, de se sentir connecté à elle dans cet instant de proximité.

Lorsque la porte de la chambre s’ouvre sur Ezra, je passe par toute sorte d’émotions. La colère, la folie, le soulagement, la tristesse, la joie. Mais la colère revient bien vite pour prendre le dessus sur toutes les autres. Et c’est sa joue que ma main vient rencontrer de façon plutôt violence. Je le regrette aussitôt, non seulement le geste mais aussi parce que cela me fait un mal de chien. Je secoue ma main en soufflant dessus. Et ma colère s’évanouit aussitôt.

Je me jette dans ses bras et je le serre contre moi. En réalité ma peur a été viscérale et je suis tellement soulagée qu’il soit enfin là. Et lorsqu’il entoure ma taille et me serre à son tour, je me détends peu à peu. Je pose ma tête contre son épaule et je ris à mon tour lorsque ce son sort de ses lèvres.

Je me recule légèrement et je commence à m’aider à se déshabiller. Il le faut , pour qu’il puisse se réchauffer. Je vais ensuite enfiler un tee shirt le temps qu’il finit de retirer ses vêtements, et je récupère ma grosse couverture. Je n’ai pas honte d’être dans cette tenue devant lui, je crois qu’il a vu bien plus de mon intimité que n’importe qui et je ne ressens pas de gêne à être ainsi sous ses yeux. Je me tourne vers lui, la couverture dans mes mains et je le regarde s’asseoir pour retirer son pantalon. J’observe son corps marqué par l’accident de moto. Je sais que ça lui rappelle de mauvais souvenirs ces cicatrices, parce qu’elle me rappelle aussi la mort de Leroy. Et de ce bébé que je portais. Je conserve quelques vergetures de cette grossesse, tout comme de la première. Et chaque fois je songe à ce qui aurait pu se passer dans ma vie si j’avais choisi Ezra à la place de Leroy. Même si je ne regrette rien car j’ai été heureuse malgré tout.

Je viens aux côtés du brun sur le lit et je l’enroule de ma couverture, avant de le pousser à s’allonger. Je passe sa couverture par dessus et je le rejoins pour apporter ma chaleur. Je souris légèrement à ses mots lorsqu’il dit qu’une fausse main est pratique en cas de morsure même si cette idée m’effraie quand même un peu.  « Ça je veux bien le croire.. c’est déjà chiant avec une main normale.. » Physiquement on est proche lui et moi, mais j’ai cette sensation qu’une nouvelle connexion s’est établie.

Je reste près de lui, et je l’observe avec attention. Malgré tout il a l’air d’aller bien et ça me rassure même si ses doigts semblent un peu abîmés. Je reste près de lui, pour lui laisser profiter de ma chaleur corporelle. Mais c’est aussi parce que j’ai envie d’être nul par ailleurs s’il n’est pas là. Quand on m’a dit que cet abruti était parti dans le blizzard, j’ai eu envie de me rejoindre, de le chercher. Mais je savais que ça serait idiot et surtout dangereux. J’ai gardé espoir de le voir passer les portes mais au fil des jours, cette petite flamme au fond de moi s’affaiblissait et je n’aurais pas supporté de le perdre.  « Je serai toujours là.. »

Lorsque ses doigts touchent mon visage pour replacer cette mèche de cheveux, je frissonne à ce toucher. Mes doigts s’agrippent à la couverture, et il ne peut le sentir heureusement. J’essaie de contrôler ma respiration en utilisant mon nez et non ma bouche mais mon cœur lui s’affole lorsque ses doigts descendent sur ma mâchoire. Jamais je n’ai ressenti ça, avec personne. Il s’excuse d’être parti, de m’avoir inquiété. Il voulait des souvenirs, et je le comprends tellement. Avec cet homme qui a partagé ma vie juste avant la catastrophe et cette dernière il ne me reste qu’une photo et les bijoux de Leroy et Ezra. Je n’ai plus rien hormis les souvenirs dans ma tête. J’ai d’ailleurs ce bracelet qui lui appartient, et que je pourrais lui rendre. Il faut que je m’en rappelle demain, je n’ai pas envie de me lever pour le moment. Il caresse toujours la joue, il caresse toujours ma peau et ce simple geste me fait tant de bien. Cette électricité, elle a toujours eu sa place entre nous. Peut être que je suis la seule à le ressentir mais c’est là, et ça vaut beaucoup trop cher à mes yeux.

Il pose sa main sur ma nuque, ce qui me ramène à la réalité, et j’ai à peine le temps de réaliser ce qui se passe que ses lèvres prennent possession des miennes. L’espace de quelques secondes, sûrement interminables, je suis incapable de lui rendre ce baiser. Je pense à Leroy. Mon mari, son meilleur ami. Mais bien vite, je finis par réaliser. J’ai beau l’avoir aimé, de tout mon cœur, mon âme ne lui a jamais appartenu. Parce qu’elle était à cet homme, face à moi, celui que je voulais, celui que j’ai aimé en premier. C’était Ezra depuis le début mais Leroy m’a montré ce qu’il ressentait et je pensais que ce n’était pas réciproque avec le brun. Mais le baiser qu’il me donne, me renvoie à mes sentiments, qui ont toujours été là. Je viens glisser ma main sur sa joue, et je le lui rends, d’abord timidement puis bien plus passionnément. Mon cœur explose dans ma poitrine alors que je me colle à lui. Je veux cette proximité, je le veux lui. Et même si cela ne doit qu’être pour une nuit, je suis prêt à lui offrir l’amour que je garde pour lui depuis plus de 12 ans. Je serre mes doigts sur sa joue, puis je m’aide de mon autre main afin le tirer légèrement sur mon corps. Honnêtement je me fiche du romantisme, de la douceur, à cet instant tout cela n’a plus d’importance, il n’y a que lui qui le soit. Qui soit important.

Ezra, le cœur battant à tout rompre, avait enfin pris la décision de franchir le pas en embrassant Enora. Une décision qui pesait lourd sur ses épaules, chargée d'appréhension et d'espoir mêlés. Pourtant, au moment où ses lèvres avaient effleuré les siennes, une vague d'incertitude l'avait submergé. Ne sentant pas la réponse qu'il espérait tant de la part de la demoiselle, un doute lancinant s'était immiscé dans son esprit tourmenté. Peut-être avait-il commis une erreur monumentale en osant franchir cette frontière interdite.

Était-ce un faux pas irréparable que de céder à ses sentiments pour celle qui était désormais la veuve de son meilleur ami ? Les remords tournoyaient dans son esprit, tissant une toile d'interrogations et de regrets. Après tout, il comprenait parfaitement les réticences qu'elle pouvait nourrir à son égard. La culpabilité le rongeait, comme une bête vorace se délectant de sa propre confusion. Peut-être aurait-il dû rester dans l'ombre, réfréner ses désirs et étouffer cette flamme qui n’avait cessé de briller pour elle depuis tant d’années.

Un frisson parcourut l'échine d'Ezra lorsque, contre toute attente, Enora répondit timidement à son baiser avant de le transformer avec une passion insoupçonnée. Son cœur, qui avait manqué un battement d'appréhension, se retrouva maintenant emporté dans une danse effrénée, rythmée par le désir et l'émoi.

Guidé par une impulsion irrésistible, son corps se rapprocha du sien, comme aimanté par la chaleur et la douceur de leur étreinte naissante. D'un geste tendre mais assuré, il passa son avant-bras autour du bas de son dos, la décalant délicatement vers le centre du lit pour s'y installer plus confortablement contre elle.

Dans ce moment suspendu, où se mêlaient la passion et la tendresse, Ezra se sentait enfin vivant, libéré des chaînes du doute et de l'incertitude.

Le brun ne pouvait dissimuler son excitation grandissante. Malgré sa volonté de fer et son moral d'acier, le désir brûlant qu'il nourrissait pour Enora depuis tant d'années prenait désormais le contrôle absolu, rendant impossible à son deuxième cerveau de demeurer endormi.

Chaque fibre de son être était en ébullition, électrisée par la proximité enivrante de celle qu'il avait secrètement convoitée pendant si longtemps. Chaque battement de son cœur résonnait comme un appel impérieux à céder à cette passion qui le consumait, abolissant toutes les barrières qui avaient pu entraver leur chemin jusqu'à présent.

Dans cet instant de fébrilité délicieuse, Ezra réalisa que ce qu'il avait tant désiré était enfin à portée de main.



Pris soudain d'une lucidité troublante, Ezra ressentit un élan de préoccupation croissante. Une inquiétude sourde s'empara de lui, le faisant douter soudainement de ses gestes passionnés. Dans un mouvement instinctif, il recula son visage de celui d'Enora, plongeant ses yeux dans les siens avec une intensité troublante, cherchant à décrypter les émotions qui s'y reflétaient.

Une question muette planait, suspendue dans l'air chargé d'électricité : était-ce réellement ce qu'elle désirait ? L'angoisse de forcer Enora, de franchir une frontière invisible sans son consentement, pesait lourdement sur ses épaules. Il avait besoin de savoir, avait besoin d'entendre de ses propres lèvres si elle était pleinement engagée à aller plus loin.

Il se décide à m’embrasser, et je ne m’y attendais vraiment pas pour tout avouer. Et je réfléchis à toute vitesse. A tout ce qui est lié à ce simple geste. Et il ne me faut pas beaucoup de temps pour réaliser que c’est ce que je veux aussi. Je caresse sa joue de mes doigts alors que je lui rends ce baiser qu’il m’offre. Je n’ai plus peur de lui montrer ce que je ressens pour lui, même si j’ai cette infime sensation de trahir celui que j’ai aimé, parce qu’il était son meilleur ami. Mais c’est une culpabilité qui s’envole alors que le baiser devient passionné. Je n’ai plus peur.

Lorsqu’il glisse son bras dans mon dos, je me colle à lui alors que je passe mes doigts dans ses cheveux, que je serre légèrement. Cette chaleur qui entoure mon corps, je ne l’avais jamais ressenti jusque là et ça me plaît, ça me plaît beaucoup trop.

Je sens que lui aussi ça lui plaît, je le sens lorsqu’il se colle à moi. Je serre mes doigts dans sa chevelure, enivrée par cette proximité entre nous.



Il se recule et je rouvre les yeux. Je le vois dans son regard, qu’il est en plein doute. Je viens doucement glisser mes mains sur mes joues. Je caresse doucement sa barbe de mes doigts. Qu’est ce qu’il est beau, même lorsqu’il est fatigué. Je sais qu’il se questionne sur ce que l’on est en train de faire. Je sais qu’il attend de savoir si je veux aller plus loin. Et peut être qu’il se demande si lui a envie d’aller plus loin.

Le regard d'Ezra plongeait profondément dans celui d'Enora, une interrogation silencieuse flottant entre eux. Il se demandait si ce qui était sur le point de se produire était une erreur ? Ses pensées vagabondaient vers Leroy, son meilleur ami désormais disparu. Malgré cela, une envie irrépressible le consumait, une envie qui existait depuis toujours, depuis le jour où Enora avait franchi les portes du garage. Il avait laissé passer sa chance, laissant Leroy prendre sa place, restant en retrait dans le silence. Aujourd'hui, l'opportunité s'offrait à lui d'être avec elle, mais il ne voulait pas que la pure pulsion charnelle ruine tout.

Alors, il avait interrompu tous ses mouvements, cherchant dans le regard ou le geste d'Enora une indication de ses propres désirs. Ses paupières se fermaient doucement, se laissant envelopper par la sensation de la main de la brune caressant sa joue avec tendresse. À son tour, il répondait à ce geste, glissant doucement ses doigts le long de la joue d'Enora. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, l'amour qu'il éprouvait pour elle imprégnant chaque fibre de son être.

Je plonge à mon tour mon regard émeraude dans celui d’Ezra. Je connais très bien la question qui demeure silencieuse, parce que je me la suis toujours posée face à lui. Est-ce une erreur de l’aimer lui alors que mon mari mort était son meilleur ami ? Pourtant depuis le début c’était lui qui avait fait battre mon cœur, alors même que je posais un premier pied dans ce garage. Je m’étais laissée séduire par le meilleur ami de l’homme dont j’avais eu le coup de foudre et j’avais appris à taire ses sentiments pour laisser place à d’autres. Mais plus rien ne me retenait maintenant, plus rien ne m’empêchait de les laisser sortir, de les exprimer.

À la mort de mon mari, la vie m’avait apprit qu’elle était courte mais depuis que l’apocalypse s’est abattue sur la planète c’est d’autant plus vrai. J’ai retrouvé cet homme alors que le monde était détruit et que des milliers de kilomètres nous séparaient. On s’est retrouvés sans même savoir où se trouver, alors je me fiche bien de tout le reste. Je caresse sa joue avec un sourire alors que mes yeux verts, ne quittent pas du regard les siens. J’aime sentir sa barbe piquante, les callosités de sa peau, ses ridules sous mes doigts. Je finis par balader mes mains sur lui et je finis par échanger nos positions assez aisément dans le lit. Je le regarde, il semble étonné et une lueur de malice traverse mon visage pour s’arrêter sur mon sourire. Mes lèvres gagnent les siennes, et je l’embrasse avec fougue, alors que mes doigts s’appuient sur son torse.

"Je ne te le fais pas dire... C'était incroyable." Il se pencha sur le côté, déposant sa main contre sa joue pour la forcer à plonger son regard dans le sien, cherchant à capturer chaque étincelle de ce moment magique. "Je t'aime, Enora," dit-il sincèrement, les mots chargés d'une vérité profonde qui avait attendu ce moment pour se révéler. "Ce n'est pas le post-orgasme qui me fait dire ça," répéta-t-il doucement, ses yeux plongeant dans les siens avec une intensité nouvelle. "C'est toi, Enora. C'est tout ce que tu es, tout ce que tu représentes pour moi. Je t'aime depuis bien avant ce moment, depuis bien avant cette nuit, et je continuerai à t'aimer bien après…"