just to get it all out

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@abby v. miller

@Orion Wade

Je prends sur moi. Vraiment. Je me plie aux règles et il y en a beaucoup. Certes, moins qu’à la Colline mais ce n’est pas pareil. A la Colline, je ne comptais pas rester. Je voulais qu’il soigne ma tante pour qu’on puisse repartir ensuite, à la recherche de Sasha. Mais, il faut que je me fasse une raison. Sasha est ici et donc désormais, la Tanière est ma nouvelle maison. Donc les règles sont permanentes. Et je dois les respecter. Et ça me fait royalement chier. J’ai du mal à m’acclimater, ici. Je ne peux pas passer tout mon temps avec Sasha - malheureusement. Certaines personnes me manquent, à la Colline et j’en suis le premier surpris. Je suis parti sans même me retourner mais maintenant c’est différent. J’ai atteint mon but alors forcément, j’ai plus de temps pour penser. Ma tante me manque aussi. Affreusement. Je n’ai même pas pris le temps de la pleurer. Et toutes ces émotions, ça me met en colère.

Physiquement, je suis au top de ma forme, par contre. Je me sens bien, je m’entraîne toujours autant, je mange équilibré et à part le sommeil qui continue de me fuir, j’ai rarement été en aussi bonne santé. C’est pour ça que je ne comprends pas pourquoi on m’impose ce fichu contrôle de routine. Sans compter que ça fait presque une heure que j’attends, assis sur une chaise comme un imbécile et que visiblement mon rendez-vous est en retard. Mon genou tressaute impatiemment, comme chaque fois que je dois attendre sans pouvoir m’occuper. Ma tante me disait souvent que j’avais des vers au cul. Elle n’avait pas tort, je n’ai jamais été du genre à rester sans rien faire. J’aurais sûrement dû d’ailleurs, ça m’aurait évité pas mal d’ennuis. Seulement, être inactif, c’est impossible pour moi. C’est encore pire depuis la pluie. Tout peut s’effondrer si vite… Une petite averse et une partie de l’humanité a été décimée. C’est le genre de choses qui vous font penser qu’à tout moment la fin peut arriver.

Une femme arrive enfin dans la pièce et je me lève, de mauvaise grâce. « Ben dis donc… la ponctualité, c’est pas votre truc à vous… »  Comme si j’avais que ça à faire… Sauf que justement, je n’ai pas grand-chose à faire non plus. Sans aucune motivation, je me lève pour suivre l’infirmière. Elle me fait asseoir et je ne me retenir de lever les yeux au ciel. « Écoutez, je vais très bien. Cette visite est complètement stupide ! D’ailleurs j’ai passé deux semaines en quarantaine pour être sûr que je n’avais rien ! » Râler me fait un peu de bien. Il faut que j’extériorise cette colère, ou sinon, je vais exploser. «  Je suis en parfaite santé, je vous le jure ! »

Abby venait tout juste de rentrer de son deuxième séjour à la Colline. Celui-ci avait été finalement assez différent du premier. Sa relation avec Spirou et celle naissante avec Fay avait changé la donne. Pas moyen de les laisser là bas. Il restait juste à savoir quoi faire et surtout comment. Leur faire prendre le moins de risques possible était sa grande priorité. Sauf que là tout de suite, elle était de retour à la Tanière, et que mine de rien, elle avait du travail. Rester focus n’avait jamais été son super pouvoir, alors là c’était encore pire. Son côté tête en l’air reprenait le dessus comme une énorme furie. Il lui arrivait de parler puis de s’arrêter net, incapable de se souvenir de ce qu’elle voulait dire. Ou encore partir puis revenir, en ayant oublié ce qu’elle voulait faire. En soit, des choses bien banales mais regroupées et trop nombreuses, cela la faisait doucement mais sûrement vriller. Et il lui manquait déjà. C’était tellement stupide !

Et elle en avait des choses à faire ! Pas le temps de se tourner les pouces, pas le temps d’aller chiller tranquillement dans un coin. Qu’est ce qu’elle aurait préféré ça, pouvoir se mettre dans un coin et ne plus rien faire de sa journée… Mais non. Elle était infirmière, et elle devait travailler un peu. Au moins pour mériter de rester suite à ses nombreuses conneries. Dire qu’elle allait sans doute en faire de nouvelles bientôt… Bref !

Revenons plutôt à nos moutons. La rousse venait de terminer un soin sur le bras d’un petit garçon qui avait fait le mariole dans la cour. Juste deux points de suture, une sucette et hop c’était fini. Elle enchaina ensuite sur le contrôle d’un oeil qui avait pris la veille des paillettes métaliques, quelle idée de couper du métal sans lunettes aussi putain. Là par contre c’était moins beau, plus inquiétant. Elle perdit donc pas mal de temps à rincer, soigner, même retiré l’une de ses paillettes. Elle avait un peu de peine pour ce type, pas sûre qu’il garde son œil. Alors ouais, elle passa plus de temps avec lui, à tenter de le rassurer mais aussi en restant factuel. Sans doute que l’équipe médicale allait devoir faire un tour dans les ateliers pour râler un peu. Elle laisserait faire Juba ou Violet. Le troisième patient, c’était juste un énième pansement, le quatrième une infection dégueulasse qu’il fallait surveiller et nettoyer… Autant dire qu'avec sa tête ailleurs et en plus son étourderie, elle prit plus de temps que prévu.

Essayant de rattraper le temps perdu, elle arriva en courant dans la pièce où se trouvait Orion, son dossier à la main. Ou, il n'était pas content. Elle s’arrêta net, le regarda se lever, impressionnée d’ailleurs par sa taille, et le laissa parler. Elle esquissa un sourire à la fin de sa tirade.

- Mais c’est qu’il mord le géant !

Elle ne put s’empêcher d’éclater de rire ensuite. Elle se moquait peut-être un peu du jeune homme mais c’était surtout ses nerfs qui lâchaient lentement mais sûrement. Il n’avait pas choisi le meilleur moment pour lui faire un grand laïus plein de colère. Sauf qu’elle ne devait pas prendre la mouche, ce n’était pas contre elle qu’il râlait le pauvre. Mais contre ce système de quarantaine chiant. La rousse continua de rire un petit moment avant de se calmer, effaçant quelques larmes aux coins de ses yeux.

- Je te remercie bien Choubidou, j’en avais besoin. Je m’excuse pour le retard, je devais voir du monde avant de venir te voir. Tu n’étais pas prioritaire vu que comme tu dis tu es en parfaite santé. Mais promis, la prochaine fois je n’irai pas recoudre un enfant, ni nettoyer une infection, ni retirer une paillette métallique d’un œil. Et je ne dis pas ça pour te faire culpabiliser. Détends toi, vraiment. Je suis gentille. On finit ça et je te libère.

La rouquine lui offrit un sourire et désigna à nouveau la chaise, l’air de dire “pose ton cul là”. Elle observa de nouveau le dossier d’Orion, quasiment vierge de toutes informations, puis releva la tête vers le jeune homme et s’installa au sol à défaut d’avoir une autre chaise dans la pièce. Elle croisa les jambes, Barjot profitant de cet instant pour enfin se manifester. Abby laissa le chat s’installer sur ses jambes, lui offrit même une caresse. Un stylo fut retiré du chignon qu’elle avait fait à la va-vite.

- Alors alors ! Orion, 25 ans et tu viens de Californie. Tu as pas mal voyagé dis moi. Tu fais quelle taille pour quel poids ? Tu as des allergies, des maladies ou tout truc du genre ? Ah putain j’ai oublié. Je suis Abby ! Infirmière à la Tanière, et voici Barjot mon chat. Et enfin, tout ce que tu diras ici restera purement confidentiel, je n’indiquerai sur le dossier que ce que tu voudras y voir inscrit. Je te l’ai dit. Je ne suis pas si chiante que ça, juste bordélique et désorganisée.

@Orion Wade

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L’infirmière éclate de rire, ce qui me laisse perplexe. D’autant que ça dure… vraiment longtemps. Je ne pense pas qu’elle ait toute sa santé mentale. Et c’est plutôt inquiétant pour quelqu’un qui est supposé soigner les gens. Après quelques secondes qui me mettent mal à l’aise - où je suis franchement très mal à l’aise, ne sachant pas sur quel pied danser, elle se calme. Puis, elle se lance dans un grand laïus sans me laisser le temps d’en placer une. Je la laisse finir, silencieux. « Je suis pas le seul à mordre, visiblement. » je rétorque, les sourcils froncés. « Excuse-moi, j’ai juste les nerfs un peu à vif… On peut se tutoyer, ?» Je suis de mauvaise humeur, certes mais au fond, elle n’y est pour rien. Et puis, des objets pointus trainent un peu partout et je n’ai pas vraiment envie de perdre un oeil. Et… bah elle n’a pas l’air d’être la plus stable de la Tanière, quoi.

Sagement, un peu calmé aussi, je la suis et m’assieds sur la chaise qu’elle me désigne, en lisant un dossier très fin que je suppose être le mien. Elle s’assoit à même le sol et un chat bondit sur ses genoux en se lovant contre elle. Personnellement, je n’ai jamais été spécialement fan des animaux, j’ai déjà du mal à m’occuper de moi. Mais c’est vrai qu’il est mignon. Abby, comme je l’apprends, parle énormément. Vraiment, c’est un moulin à paroles. J’ai l’impression qu’elle ne peut pas s’exprimer autrement que par des monologues. « Enchanté, Abby. » Je me lève de ma chaise pour m’assoir en face d’elle, en tailleur et j’en profite pour caresser le chat. « Et enchanté, Barjot ».

« Je fais 1m96 pour euh… 75kg, je pense. J’ai perdu un peu de poids, depuis la pluie mais rien d’inquiétant selon les médecins de la Colline. Je n’ai pas d’allergies et… et j’ai une addiction à la drogue. » C’est toujours difficile à dire. Même après tout ce temps sans toucher à rien, je sais qu’elle est toujours là, cette maladie, prête à me cueillir à l’instant même où je manquerais de volonté. J’aimerais beaucoup pouvoir dire que c’est du passé mais une des choses que j’ai comprises avec les nombreuses cures, c’est que ça ne le sera jamais et que c’est un combat que je devrais mener à vie. « Je suis sobre depuis un peu plus de six ans maintenant. J’ai fait pas mal de cures et… je crois que je gère bien. Si tant est qu’on puisse le gérer. » Mon regard dévie vers le dossier. « Tu peux le noter, ce n’est pas un secret. Mais évite quand même de le crier sur tous les toits quoi… C’est pas une étiquette agréable à porter. »

J’en parle avec plus de facilités, maintenant. Il m’a fallu longtemps avant d’admettre que c’était un problème dans ma vie. La drogue, l’alcool… Ouais, il a fallu d’énormes disputes pour que je me décide à reconnaître que je ne contrôlais plus rien. « A part ça, ça va. Enfin, je veux dire que si tu dois recoudre un enfant ou nettoyer une infection, tu peux y aller, quoi… »

Paraître pour une folle, voilà le super pouvoir que la jeune femme avait réellement acquis et peaufiné au fil du temps. Enfin, paraître, non elle l’était tout simplement. C’était tenté de paraître normal qui était par contre impossible. Il ne fallait pas non plus demander la lune hein ? Et pour le coup, son entrée en scène avait de quoi être désarçonnante. Le pauvre Orion qui n’avait absolument rien demandé en plus. Il était excédé d’avoir attendu ? En vrai elle l’aurait été. Surtout après deux semaines d’attente à sans doute se faire chier comme un grand rat mort. Sans doute que lui aussi aurait préféré être ausculté par Juba plutôt qu’elle. Mais dommage pour lui, il était tombé sur la folle. Il allait devoir la subir quelques minutes de plus.

Elle lui adressa un rapide “ok” avec une main en ce qui concernant le tutoiement. Franchement qui se faisait encore chier à dire vous ? Sans doute des prétentieux un peu hautains. Bah heureusement elle ne les avait pas face à elle. Assise au sol, elle commença ou plutôt continua son long interrogatoire. Le pauvre gosse, enfin jeune adulte, devait sans doute la trouver bien chiante. Mais le flot de paroles ne semblait pas vouloir s’arrêter de son côté. Les idées fusant de toute part et parfois même en même temps. Épuisant pour les autres mais aussi pour elle même. Heureusement, elle avait son petit soutien personnel qui était toujours là, lui. La rousse esquissa un sourire, appréciant en silence le fait qu’Orion se mette à son niveau. Rien que ça indiquait bien des choses sur le caractère du jeune homme. Il était grand, ça oui, mais il ne semblait pas vouloir prendre qui que ce soit de haut. Intéressant.

Abby se mit aussitôt à noter les informations que lui donnait Orion, haussant un sourcil face au ratio taille/poids. Mais en vrai après un calcul assez chiant, son IMC fut largement suffisante. Il était dans la norme. À surveiller malgré tout. Elle se le nota quand même comme petit point de vigilance. Vu son gabarit, il allait manger plus que la norme d’ailleurs. Mais une chose après l’autre. Il venait de lâcher quelque chose de bien plus important. Elle releva la tête du dossier et le regarda calmement. Pas l’ombre d’un jugement de sa part, car pour parler de ça il faut une bonne dose de courage à ses yeux. Elle lui laissa largement la place de parler, bavarde certes mais aussi respectueuse. Elle l’observa simplement, reposant le dossier et le stylo au sol à côté d’elle. Barjot venait de quitter les cuisses de la jeune femme pour venir renifler le grand jeune homme, elle le laissa faire.

- Je le note seulement si c’est vraiment ce que tu veux. Seul le personnel médical aura accès à ce genre d’information de toute façon. Personne d’autre n’a besoin de savoir tu sais ? Tu peux juste me dire à quel type de drogue tu étais addict’ ?

Elle esquissa un sourire à l’attention du jeune homme, croisa ses propres mains entre elles. Les soucis d’addiction, c’était une des problématiques les plus importantes encore à l’heure actuelle. Elle pouvait jouer la maline mais elle était aussi concernée. Pas par des drogues dites dures mais par des choses qui posaient quand même bien des problèmes. La rousse hocha doucement la tête, comptant bien entendu ne pas crier ça sur les toîts, elle savait parfaitement le poids que pouvait prendre une stupide étiquette. Elle l’assumait dans son cas, plus parce qu’elle n’avait plus le choix qu’autre chose ceci dit. Abby souleva une main et la secoua négativement.

- Nan c’est bon, je suis toute à toi là tout de suite. Et vu que je garde ton secret, je vais te révéler l’un des miens. J’ai moi-même un souci d’alcoolémie, je suis un peu abusive là dessus. On a tous des problèmes, l’important est de trouver des personnes soutenantes. Ou des êtres. Barjot m’aide pas mal, un super soutien émotionnel. En tout cas, si je peux faire quoi que ce soit, n’hésites pas. Je ne suis pas parfaite hein ? Mais je sais faire quelques trucs quand même.

Son sourire qui s’était un peu fané redébarqua sur les lèvres rapidement. L’animal s’était installé contre Orion sans oser lui grimper dessus. Elle inspira puis soupira un peu. Ses deux mains se placèrent sur le sol et elle se laissa un peu aller en arrière pour être un peu plus à l’aise. Elle avait tellement de questions en tête pour le jeune homme mais une en particulier lui trottait en tête.

- Donc avant tu étais à la Colline ? Pourquoi ce changement de camp ?

@Orion Wade